Weteye Ndidama, l’agricultrice Camerounaise qui veut changer le quotidien des femmes

Au cœur des montagnes de la région de l’Extrême-Nord du Cameroun, à quelques kilomètres de la frontière avec le Nigéria, Weteye Ndidama, 35 ans, se rend comme chaque matin au champ, à une trentaine de minutes du village de Mozogo où elle habite. Une fois sur sa plantation, elle retrouve la trentaine de femmes, membres du collectif qu'elle a créé en 2014. Après l’habituelle réunion sur les tâches du jour, toutes se mettent au travail dans la bonne humeur, malgré le soleil caniculaire qui les accompagnera toute la matinée.

12 août 2024
a little boy wearing a blue hat

Cameroon

Photo: UNDP WACA

Outre ce champ, un passé commun réunit la plupart de ces femmes, celui d’avoir eu à quitter leur village d’origine à cause des attaques récurrentes du groupe extrémiste Boko Haram et d’autres groupes armés qui sévissent dans cette région depuis 2013.

« Quand on était au plus fort de la crise, la situation était très compliquée. Il y a eu beaucoup d’enlèvements, de dégâts matériels, de nombreux déplacements forcés », se souvient Weteye. « On ne pouvait pas aller au champ de peur de se faire kidnapper », ajoute-t-elle.

Elles se sont alors retrouvées à Mozogo, ce village qui accueille l’un des plus grands nombres de personnes déplacées dans la région. Malgré un retour au calme dans leurs villages d'origine, beaucoup ont choisi de rester à Mozogo.

Reconstruire sa vie grâce à l’agriculture

Pour les aider à tourner la page sur cette période difficile, Weteye compte sur son collectif de femmes agricultrices, à la fois pour recréer des liens sociaux, mais aussi pour revitaliser les activités  économiques dans ces zones reculées. 

« Nous avons décidé d’unir nos forces pour cultiver la terre, échanger et promouvoir le vivre ensemble. Aujourd’hui, nous sommes comme une famille »
Weteye Ndidama, agricultrice

Reconstruire leur vie grâce à l’agriculture, le pari est en passe d’être réussi pour les femmes du collectif. Ensemble, elles cultivent près de 1/2 hectare de terres, produisant principalement du maïs, du mil, de l’arachide et des oignons. Des cultures qui leur permettent à la fois de nourrir leur famille, mais aussi de vendre sur les marchés de Mozogo et dans les grandes villes de la région. « Nous vendons environ trois tonnes à chaque récolte. Pour nous, c’est une fierté de fournir ces produits à notre communauté », se félicite l’une des femmes du groupement.

Réduire les discriminations

Le groupement de Weteye se veut un exemple du vivre ensemble dans une région où les préjugés entre communautés sont parfois tenaces. Les jeunes femmes viennent de différentes communautés. Certaines sont Mafas, d’autres Mandaras. « Cela importe peu pour moi», assure Weteye. « J’aimerais que l’on puisse réduire les conflits communautaires au Sahel, réduire les discriminations ». Pour cela, elle compte sur les valeurs d’entraide, de partage et de solidarité qu’implique l’agriculture.

Depuis fin 2020, le PNUD, le Programme des Nations Unies pour le développement soutient Weteye Ndidama et ses collègues du groupement. «Nous les avons soutenues d'abord à travers des formations en techniques de production, conservation et transformation des produits agricoles, puis dans le suivi et l'encadrement technique de leurs activités de production. Enfin, en matériel et équipement agricole, intrants et semences pour un montant de 2.000.000 FCFA », explique Apollinaire Adamou, expert national livelihood au PNUD de Maroua, le chef-lieu de la région de l’Extrême-Nord du Cameroun. Aujourd’hui, nous continuons le suivi et l’encadrement de leurs activités de production”, a-t-il-ajouté.

En parallèle, dans le village de Mozogo, le PNUD a également réhabilité le marché et construit des entrepôts pour stocker et conserver la marchandise.

« Croire en la jeunesse sahélienne »

Malgré les difficultés du quotidien et les risques sécuritaires, Weteye Ndidamaen est persuadée que le «  courage est la clé pour exister et avancer ». Il faut croire en la jeunesse sahélienne », dit-elle.

«On ne doit pas rester les bras croisés. On doit garder la tête haute ! Ensemble, soyons les piliers du développement de nos communautés au Cameroun, comme dans tout le Sahel. Ensemble, œuvrons pour la paix et le bien-être de tous ».