Bouée de sauvetage pendant la COVID-19, la finance numérique pourrait avoir un impact transformateur sur le développement durable
La finance numérique peut assurer le financement à long terme des Objectifs de développement durable
26 août 2020
New York - La crise sociale et économique sans précédent provoquée par la pandémie de COVID-19 a mis en exergue le rôle de la finance numérique dans l’aide apportée à des millions de personnes à travers le monde, dans le soutien aux entreprises et dans la protection des emplois et des moyens de subsistance.
Si la pandémie laisse voir les avantages immédiats de la finance numérique, le potentiel d’innovation de la numérisation dans la transformation de la finance quant à lui est immense. Les technologies de paiement mobile ont transformé les téléphones mobiles en outils financiers pour plus d’un milliard de personnes. Le numérique aide le « big data » et l’intelligence artificielle à faire avancer les cryptomonnaies et les cryptoactifs, les prêts entre pairs, les plateformes de financement participatif et les marchés en ligne. Les banques ont investi plus de 1 000 millions de dollars dans le développement, l’intégration et l’acquisition de technologies émergentes. En 2018, les investissements dans la « fintech » ont atteint 120 milliards de dollars, soit un tiers du financement mondial en capital-risque.
Aujourd’hui, un nouveau rapport intitulé L’argent des citoyens : Exploiter la numérisation pour financer un avenir durable (PDF), établi par l’Équipe spéciale chargée de la question du financement numérique mise sur pied par le Secrétaire général des Nations Unies, expose un programme d’action pragmatique et ambitieux. Sur le fond, ce rapport explique comment la finance numérique peut être mise à contribution de manière à permettre aux citoyens, en leur qualité de contribuables et d’investisseurs, d’envisager une transformation numérique à grande échelle qui assure une meilleure mise en phase de l’argent des citoyens et de leurs besoins, exprimés collectivement à travers les Objectifs de développement durable (ODD).
Le rapport souligne comment des milliards de personnes dans le monde font face à la pandémie de COVID-19 en ayant recours à des outils numériques pour travailler, dépenser et socialiser. Il fait valoir qu’il existe une opportunité historique d’exploiter la numérisation en mettant les citoyens, ultimes propriétaires des ressources financières mondiales, aux commandes de la finance pour s’assurer que celle-ci répond à leurs besoins, aujourd’hui et demain.
L’Équipe spéciale a recensé cinq mesures catalytiques possibles pour exploiter la numérisation dans le cadre de la mise en correspondance des financements avec les ODD. Ensemble, elles couvrent une grande partie de la finance mondiale. Il s’agit des mesures suivantes :
- Mettre à contribution les importantes réserves de ressources qui circulent sur les marchés financiers mondiaux pour les ODD.
- Accroître l’efficacité des finances publiques, qui constituent une part importante de l’économie mondiale, et renforcer la responsabilité en la matière.
- Orienter l’épargne intérieure accumulée numériquement vers le financement du développement à long terme.
- Informer les citoyens sur comment lier leurs dépenses de consommation aux ODD.
- Accélérer les financements vitaux pour l’emploi et les activités génératrices de revenus des petites et moyennes entreprises.
Le programme d’action élaboré par l’Équipe spéciale est un appel à l’action lancé aux entreprises, aux décideurs et aux responsables de la finance à faire le nécessaire pour mettre en œuvre ces mesures. Il décrit non seulement ce qu’il faut faire, mais aussi comment procéder : les investissements, les nouvelles capabilités et les innovations dans le domaine de la gouvernance peuvent s’avérer efficaces.
L’Équipe spéciale conclut que mettre la numérisation au service du bien est un choix délibéré et non une issue inéluctable imposée par la technologie. Le programme d’action qu’elle a établi indique les actions à mener pour surmonter les risques numériques qui, s’ils ne sont pas atténués, pourraient aggraver l’exclusion, la discrimination et les inégalités, et creuser davantage le fossé entre la finance et les besoins associés à un développement inclusif et durable.
Des dirigeants s’expriment
Le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a déclaré : « Les technologies numériques, qui transforment les marchés des capitaux de façon révolutionnaire, peuvent changer la donne dans la poursuite de nos objectifs communs. L’Équipe spéciale chargée de la question du financement numérique des objectifs de développement durable montre la voie pour tirer parti de la révolution numérique. »
Maria Ramos, coprésidente de l’Équipe spéciale chargée de la question du financement numérique mise sur pied par le Secrétaire général des Nations Unies, a déclaré : « Nous avons là une occasion historique d’accélérer et d’accroître l’impact transformateur de la numérisation. Plus particulièrement, la finance numérique, qui dans cette crise est devenue la bouée de sauvetage pour de millions de personnes à travers le monde, repousse les limites de l’inclusion financière en donnant aux citoyens des moyens d’action en tant qu’épargnants, investisseurs, emprunteurs, prêteurs et contribuables d’une manière qui leur donne le choix et le pouvoir concernant leur argent. »
Achim Steiner, Administrateur du PNUD et coprésident de l’Équipe spéciale chargée de la question du financement numérique mise sur pied par le Secrétaire général des Nations Unies, a déclaré : « La pandémie de COVID-19 révèle l’immense potentiel que recèle la finance numérique d’avoir un impact transformateur. Les transferts numériques permettent aux pouvoirs publics d’apporter une aide aux personnes dans le besoin, les plateformes de financement participatif mobilisent des fonds pour des fournitures médicales et des secours d’urgence, et les prêts algorithmiques permettent aux petites entreprises d’accéder plus rapidement aux fonds. La rapidité de la diffusion récente de ces technologies est certes impressionnante, mais les progrès ne sont pas automatiques. Pour que la numérisation soit une véritable force permettant d’atteindre les objectifs de développement durable, les progrès technologiques doivent s’accompagner de mesures publiques qui responsabilisent les citoyens et permettent à notre système financier de relever les défis d’investissement urgents qui doivent être surmontés pour mieux avancer. »
Le rapport
Un exemplaire sous embargo de la version abrégée du rapport est mis à la disposition des journalistes. Télécharger le rapport ici ou sur www.digitalfinancingtaskforce.org.
Contacts pour les médias
Pour de plus amples informations ou pour programmer une interview :
À New York
Dylan Lowthian dylan.lowthian@undp.org +1 646 673 6350
Duygu Celik duygu.celik@uncdf.org +1 646 939 6645
À Genève
Sarah Bel sarah.bel@undp.org +41 79 934 11 17
Notes de la rédaction
Le rapport sera lancé à New York par le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres, et les deux coprésidents de l’Équipe spéciale, à savoir Achim Steiner, administrateur du PNUD, et Maria Ramos, jusqu’à récemment PDG du groupe ABSA.
Quatre membres de l’Équipe spéciale les rejoindront dans le cadre d’un débat qui sera animé par Simon Zadek, chef du secrétariat de l’Équipe spéciale. Ces membres sont les suivants :
· Patrick Njoroge, gouverneur de la Banque centrale du Kenya
· Natalie Jabangwe, directrice générale d’EcoCash
· Eric Jing, président exécutif d’Ant Group
· Ceyla Pazarbasioglu, vice-présidente du Groupe de la Banque mondiale chargée de la croissance équitable, des finances et des institutions
À propos de l’Équipe spéciale
L’Équipe spéciale a été mise sur pied par le Secrétaire général des Nations Unies avec pour mission de recommander et faciliter des moyens d’exploiter la numérisation pour accélérer le financement des ODD. Réunissant 17 dirigeants des secteurs de la finance, des technologies, des politiques publiques, de la réglementation et du développement international, elle s’est entretenue avec des centaines d’institutions financières, de gouvernements et d’organismes de réglementation, d’organisations de la société civile, de groupes de réflexion et de groupes d’experts dans des dizaines de pays.
Elle est coprésidée par Achim Steiner (administrateur du PNUD) et Maria Ramos (récemment encore PDG du groupe ABSA). Ses membres sont les suivants : Maiava Atalina Emma Ainuu-Enari (gouverneure et présidente du conseil d’administration de la Banque centrale du Samoa), Henrietta H. Fore (directrice de l’UNICEF), Mats Granryd (directeur général de l’association des entreprises du secteur des communications mobiles, GSMA), Piyush Gupta (directeur général de DBS Bank), Natalie Jabangwe (directrice générale d’EcoCash), Eric Jing (président exécutif d’Ant Group), Bradley Katsuyama (fondateur et directeur général d’IEX), Pooma Kimis (directrice à Autonomous Research), Liu Zhenmin (Secrétaire général adjoint aux affaires économiques et sociales), Phumzile Mlambo-Ngcuka (Secrétaire générale adjointe de l’ONU et directrice d’ONU Femmes), Ambareen Musa (fondatrice et directrice générale de Souqalmal), Patrick Njoroge (gouverneur de la Banque centrale du Kenya), Ceyla Pazarbasioglu (vice-présidente de la Banque mondiale), Richard Samans (directeur général et membre du directoire du Forum économique mondial), et Aurélie Adam Soule Zoumarou (ministre de l’Économie numérique et des Communications du Bénin).
Les membres de l’Équipe spéciale agissent en leur nom propre.
Nous remercions l’Allemagne, l’Italie et la Suisse pour la généreuse aide financière et le soutien apportés à l’Équipe spéciale.
Un certain nombre d’initiatives Pathfinder ont été prises en association avec l’Équipe spéciale qui témoignent d’une démarche ambitieuse dans la mise en œuvre du programme d’action.
· Le Bangladesh étudie comment exploiter la numérisation pour orienter la micro-épargne nationale vers des investissements dans des infrastructures durables, notamment des routes ou des ponts, des systèmes d’assainissement ou des hôpitaux. Cette démarche pourrait donner lieu à une réduction conséquente du coût du capital et avoir des effets économiques multiplicateurs à mesure que les citoyens bangladais les plus pauvres en récoltent les dividendes, parallèlement à une amélioration de leurs régions.
· Avec le concours de la bourse des investisseurs numériques IEX et du FENU, la principale plateforme de paiements du Zimbabwe, EcoCash, a procédé au lancement d’une première bourse au monde qui s’appuie sur les données des paiements des entreprises générées automatiquement pour effectuer des vérifications préalables et attribuer des cotes de crédit en vue d’éventuelles admissions en bourse. La plateforme espère ouvrir un guichet de financement par emprunt et par prise de participations dont les PME zimbabwéennes innovantes et à croissance rapide ont grand besoin.
· L’Initiative Gambia Pathfinder a pour objet de promouvoir l’inclusion financière en garantissant un cadre d’intervention propice et en encourageant l’investissement privé dans l’infrastructure numérique et dans des produits et services de financement numérique innovants et centrés sur les citoyens. L’initiative est pilotée des membres de l’Équipe spéciale d’EcoCash, d’ONU Femmes et du groupe des entreprises du secteur des télécommunications mobiles, GSMA, avec le soutien du FENU.
· La Banque centrale du Kenya s’emploie à promouvoir un écosystème régional de financements numériques pour encourager l’innovation en la matière par le renforcement de la demande locale et l’offre d’un accès à des marchés plus importants. Œuvrant en faveur de la coopération internationale, la Banque centrale a noué de solides liens l’Autorité monétaire de Singapour (MAS) pour promouvoir la coopération entre Singapour et l’Afrique de l’Est.
· Refinitiv procède au lancement d’une initiative sur la gouvernance numérique des infrastructures baptisée « Infrastructure 360 ». Il fournit des informations et des éclairages fiables sur plus de 60 000 projets, intégrant des données sur le financement de projets, les marchés conclus, les prêts, la diligence raisonnable, les profils de risque et les risques macroéconomiques, géopolitiques et opérationnels, tenant compte de critères environnementaux, sociaux et de gouvernance pour aider les investisseurs, les pouvoirs publics et les citoyens à prendre des décisions d’investissement viables.
· La Green Digital Finance Alliance a élaboré un cadre de mesure qui évalue les infrastructures, les actions des pouvoirs publics et les investissements favorisant une finance numérique durable. Les informations recueillies aident à façonner la conception des politiques et des réglementations visant à aligner la finance numérique sur les priorités nationales en matière d’ODD et à générer des connaissances sur les pratiques viables de finance numérique.
· Le Dialogue international sur la finance numérique mondiale a été établi sous la houlette des gouvernements du Kenya et de la Suisse. Il vise à faciliter un échange de vues équilibré et plus inclusif, auquel participent notamment les pays en développement, sur la gouvernance des plateformes mondiales de finance numérique alignées sur les ODD.
Principaux faits et chiffres
· La somme totale de l’épargne intérieure mondiale est d’environ 23 300 milliards de dollars.
· Plus de 200 000 milliards de dollars de fonds privés sont investis sur les marchés mondiaux des capitaux, souvent à des taux de rendement négligeables.
· Plus d’un tiers (35 %) des transactions sur les actions de sociétés ouvertes américaines sont déjà gérés par des fonds administrés par ordinateur.
· Au cours de la dernière décennie, des citoyens éclairés ont stimulé la demande d’investissements durables, qui ont atteint plus de 30 000 milliards de dollars en 2018, d’obligations vertes émises jusqu’à présent à hauteur de plus de 770 milliards de dollars, et d’investissements à impact estimés à 715 milliards de dollars en 2019.
· Une étude récente du Consumer Financial Protection Bureau a révélé qu’une notation améliorée numériquement se traduisait par 27 % d’approbations de prêts supplémentaires avec des taux d’intérêt moindres de 16 % dans toutes les catégories de clientèle.
· Le FMI estime la valeur de la numérisation des paiements gouvernementaux dans les pays en développement entre 220 et 320 milliards de dollars par an, soit 1,5 % des revenus. Le passage des paiements en espèces aux paiements électroniques des prestations gouvernementales génère des économies d’environ 40 % par transaction.
· Au Brésil, le passage des espèces aux cartes électroniques pour la distribution des paiements au titre des prestations sociales dans le cadre du programme Bolsa Familia a permis de diviser par sept les frais administratifs, qui ont été ramenés de 14,7 % à près de 2,6 %.
· La plateforme Alipay Ant Forest compte 550 millions d’utilisateurs qui, au mois de mars 2020, avaient réduit collectivement les émissions de carbone de près de 11 millions de tonnes.