Dans le souci d’améliorer le mieux-être des populations des zones lacustres de Ganvié, des Aguégués et de Grand-Popo, et de faciliter la mise en œuvre de projets touristiques, le Laboratoire d’Accélération des résultats de développement du PNUD a entrepris des travaux de recherche sur la demande du Bureau d’Analyse et d’Investigation de la Présidence de la République. Il ressort des travaux que les principaux défis de développement de ces régions lacustres se posent en termes d’habitation adéquate et durable, de navigabilité, notamment la circulation sur les cours d’eau entravée par la présence de la jacinthe d’eau, et d’assainissement.
Le Bénin possède plusieurs zones lacustres dont les plus connues sont la cité lacustre de Ganvié, réputée être la Venise d’Afrique, la commune des Aguégués dont le caractère lacustre est manifesté par les périodes de crue et l’enclavement de ses villages par des cours d’eau et la zone lacustre de la commune de Grand-Popo constituée exclusivement de l’Arrondissement d’Avlo. Classée patrimoine mondial par l’UNESCO, la cité lacustre de Ganvié force l’admiration à travers le monde entier de par ses attraits et potentialités, sa spécificité par le fait que ses habitants vivent en permanence sur l’eau et dans des cases sur pilotis.
Chaque année, des milliers de touristes se ruent vers ces zones lacustres pour en découvrir les merveilles de la flore et de la faune aquatique, mais elles ne répondent pas encore aux normes et standards internationaux en matière de tourisme.
Pour mieux comprendre les problématiques de développement de ces zones lacustres et y apporter des solutions durables, le Laboratoire d’accélération a utilisé en mai 2021, la méthodologie basée sur son cycle d’apprentissage en faisant des visites préparatoires sur ces sites et en y réalisant des travaux de sensemaking et d’intelligence collective.
Des défis environnementaux
Dans les zones lacustres de Ganvié, des Aguégués et de Grand-Popo, il se pose un problème d’habitats décents, d’assainissement, de gestion des déchets organiques et ménagers, d’accès à une meilleure qualité d’eau de consommation et de gestion de ladite eau. La plupart des ménages ne disposent pas de toilettes appropriées et les déchets sont jetés en vrac entraînant la pollution de l’environnement et contribuant à l’essor des maladies hydriques. En effet, la couverture en eau potable de la Société Nationale des Eaux du Bénin (SONEB) est très limitée dans ces localités. Des forages et AEV (adduction d’eau villageoise) suppléent à cette quasi-absence, mais leur qualité demeure problématique.
Les maisons étant construites sur pilotis en matières précaires (toitures en pailles), il se pose le problème de sécurité et de durabilité. La durabilité de la construction sur pilotis dépend de plusieurs facteurs dont le type de bois ayant servi aux pilotis, les dimensionnements de la maison avec les écarts entre piliers, le positionnement de la construction dans l’eau ou dans la boue et la présence ou non d’espèces rongeuses dans l’environnement des pilotis. Pendant que certaines constructions sont hybrides avec la présence à la fois de matériaux précaires et définitifs (briques et/ou bétons), des techniques d’entretien sortant un peu de l’ordinaire sont enregistrées par endroit. Des bois spécifiques, mais de plus en plus rares, permettent à certaines constructions de pouvoir perdurer dans le temps sur au moins trois (03) décennies.
Par ailleurs, la difficile navigabilité sur les cours d’eau se manifeste à travers l’obstruction des voies par la jacinthe d’eau, qui vient couvrir entièrement les chenaux navigables. Cela entrave l’accès aux champs, aux marchés, aux écoles et même aux administrations pendant les périodes où cette plante se fait abondante.
Des solutions locales pour des habitats durables
En ce qui concerne l’habitat, quelques matériaux ont été identifiés comme solutions potentielles à approfondir et tester auprès des communautés lacustres. Il s’agit de (i) « Afin » dans la langue locale des Aguégués qui est actuellement quasi-inexistante au Bénin mais dont une forme n’ayant pas les mêmes caractéristiques en termes de durabilité dans l’eau est très peu disponible au Nigéria ; (ii) le « Hêtin » et le « Tindou » en langue locale Sahouè qui sont en voie de disparition car très utilisés dans la production du charbon aux dires des autorités locales de Bopa ; (iii) les troncs de rônier arrivé à maturité qui sont utilisés comme pilotis de certaines infrastructures réalisées sur le lac Ahémé depuis plus de 18 ans. La commune de Bopa dispose de forêts de rôniers de plus de 50 ans d’âge dans les arrondissements de Agbodji et Badazouin qu’il faudra protéger pour arrêter leurs destructions ; (iv) le bois de teck à maturité (âgés de 50 ans) traité à l’huile de teck donne les mêmes résultats que le tronc de rônier arrivé à maturité ou à défaut le bois de teck âgé de 20 ans asséché par la technique de l’étuvage permet d’avoir des résultats pareils que ceux avec des tecks âgés de 50 ans).
Par rapport à l’envahissement des cours d’eau par la jacinthe d’eau, des initiatives locales sont remarquées, les unes assurant son dégagement des cours d’eau, les autres opérant sa transformation en des dérivés d’utilité pour la population. La jacinthe d’eau est valorisée pour la fabrication des produits de vannerie, le compostage, la méthanisation, la confection de sacs biodégradables, la fabrication de charbon vert, la fabrication de gel éthanol à utiliser comme combustible pour la préparation des aliments, la fabrication de fibres absorbantes, le tout en faveur de la préservation de l’environnement. En plus des cas expérimentaux et d’étude enregistrés sur ces différentes solutions dans ces zones lacustres, il s’y prépare aussi promotion d’un tourisme vert et écoresponsable par la réalisation et la promotion d’une route dite de la jacinthe d’eau afin de faire découvrir aux touristes les potentialités dont regorge cette plante.
Des perspectives
Etant donné que le Gouvernement s’investit déjà dans l’identification et l’adoption des solutions pour les questions relatives à l’assainissement et aux matériaux adéquats pour la construction des habitations dans les zones lacustres, le laboratoire d’accélération va se focaliser sur la gestion de la jacinthe d’eau pour faciliter la circulation sur les cours d’eau dans les communes des Aguégués, de Sô-Ava, prioritairement dans la cité lacustre de Ganvié, et dans la zone lacustre de Grand-Popo.