Une année de COVID-19 a mis en évidence et approfondi des inégalités de toutes sortes, y compris l’inégalité entre les sexes. Les femmes, en particulier celles issues de groupes marginalisés, ont supporté le poids de la crise : avec des charges de soins croissantes, des heures de travail réduites et une augmentation alarmante de la violence sexiste, la COVID-19 a créé des dommages sociaux et économiques durables pour les femmes et, par extension, pour leurs communautés.
En tant qu'hommes, travaillant dans le développement international au sein du PNUD, nous pensons qu'il y a une différence entre croire en l'égalité des sexes et s’engager de manière active pour faire avancer la cause. Soyons clairs. Nous ne pouvons pas – il n’en est pas question – fermer les yeux sur les effets néfastes de la discrimination fondée sur le sexe, d'autant plus que la crise actuelle les aggrave.
Cela signifie que nous devons être conscients des déséquilibres de pouvoir, y compris dans nos propres environnements de travail, et faire de la place aux personnes de tous les genres pour diriger et participer aux processus décisionnels. Le genre est inextricablement lié à la façon dont le pouvoir et les privilèges sont distribués et maintenus ; son influence couvre la santé, le bien-être et plus encore. Il nous incombe à tous, et en particulier aux personnes en position d'autorité, de faire pression pour un changement systémique à long terme. Pour cela, il faut remettre en question les dynamiques de pouvoir bien ancrées et les constructions de genre archaïques qui font obstacle aux droits humains fondamentaux de tous – hommes, femmes et personnes non binaires.
Les impacts économiques et sociaux des crises ne sont jamais neutres en termes de genre, et la crise de COVID-19 ne fait pas exception. Selon ONU Femmes, les difficultés économiques induites par la pandémie pousseront davantage de femmes que d'hommes dans l'extrême pauvreté, creusant ainsi l'écart de pauvreté entre les sexes. Les fermetures d'écoles ont également interrompu l'éducation des filles, entraînant dans certains cas des taux plus élevés de grossesses précoces et de mariages d'enfants. Avant même le début de la pandémie, une femme sur trois subissait des violences physiques ou sexuelles, un problème qui s'est intensifié tant pour les femmes que pour les autres groupes marginalisés à mesure que la COVID-19 continuait de se propager. Ces problèmes sont aggravés par la numérisation accélérée de nombreuses transactions quotidiennes, qui a creusé les inégalités entre les sexes dans des domaines tels que l'accès à Internet, les compétences numériques et les droits en ligne.
Il est important de noter que l'identité de genre recoupe également d'autres identités sociales et politiques, telles que l'origine ethnique, le statut socio-économique, le handicap, l'âge, la situation géographique et l'orientation sexuelle. Nous devons actualiser la définition courante de l'équité entre les sexes afin d'inclure les personnes issues de groupes marginalisés, qui portent souvent le poids de la stigmatisation et de la discrimination. Par exemple, les femmes transgenres sont souvent exposées à un risque accru de violence, de vulnérabilité économique et d'exclusion juridique et sociale. Les travailleurs du sexe sont également confrontés à une violence accrue et à l'instabilité économique, en particulier pendant la pandémie. Dans de nombreux pays, les femmes consommatrices de drogues se heurtent à des obstacles pour accéder à des services adaptés et sont plus susceptibles de contracter le VIH.
Trop peu de lois et de politiques comprennent les mesures sexospécifiques nécessaires pour répondre à ces préoccupations. Malheureusement, les femmes sont également tenues à l'écart des décisions clés qui affectent la réponse mondiale à la COVID-19 et le relèvement après la crise. Selon le Global Gender Response Tracker (outil global de suivi sur les questions de genre et la covid-19) du PNUD et d'ONU Femmes, seuls 12 % des pays disposent de mesures adéquates pour faire face à l'impact économique et social disproportionné de la COVID-19 sur les femmes. Parallèlement, seuls cinq pour cent des leaders de la santé mondiale sont des femmes issues de pays à revenu faible ou intermédiaire.
La COVID-19 est l'occasion d’un changer, qui soit mené et mis en œuvre par ceux et celles ayant été le plus profondément affecté(e)s. D'abord et avant tout, faire de la place aux femmes dans les instances dirigeantes de la santé mondiale est une responsabilité, dont nous devons tous être tenus responsables. Le partage égal du pouvoir peut nous aider à mieux relever les défis mondiaux, qu'il s'agisse de la COVID-19, du recul de la démocratie ou des changements climatiques. Un leadership et une participation inclusifs apportent des perspectives plus diverses aux organes et processus décisionnels, ce qui peut conduire à de meilleures politiques publiques et pratiques institutionnelles élaborées dans un souci d'équité entre les sexes.
Outre le leadership et la prise de décision à l'échelle mondiale, il est nécessaire d'intégrer la dimension de l'équité entre les sexes dans la législation au niveau national. Parallèlement à la réforme des lois, des politiques et des réglementations discriminatoires à l'égard des femmes, une meilleure législation est nécessaire pour lutter contre les normes de genre liées à des concepts de masculinité dépassés, tels que ceux qui peuvent encourager les garçons et les hommes à prendre des risques pour la santé, à commettre des violences et à ne pas chercher de l'aide ou des soins de santé. Il s'agit également de renforcer l'accès à la justice, d'améliorer le suivi et le contrôle, et de renforcer la capacité des institutions à répondre aux incidents liés à la violence sexiste.
Le moment est venu de remettre en question le statu quo en matière de genre dans la loi et dans nos communautés, et de garantir la participation pleine et effective des femmes à la prise de décisions dans tous les aspects de la vie publique, en particulier celles issues de groupes marginalisés. Pour parvenir à avenir égalitaire dans un monde post-COVID-19, une action audacieuse est exigée de notre part à tous.