Les dirigeants du monde qui se réunissent à New York cette semaine pourraient définir l’orientation de la santé humaine pour une génération
La promesse de la santé pour tous
18 septembre 2023
Lors de l'Assemblée générale des Nations unies, notamment à l'occasion des réunions de haut niveau sur les pandémies, la tuberculose (TB) et la couverture sanitaire universelle ou encore des rencontres visant à faire progresser les Objectifs de développement durable (ODD), l'action climatique et le financement du développement, les dirigeants ont l'occasion de se pencher sur les crises qui menacent les populations et la planète.
Ces crises sont interreliées, et la santé en est un enjeu central. L'extrême pauvreté a augmenté pour la première fois en une génération après la crise de la COVID-19, et les femmes ont été les plus durement touchées par les pertes d'emploi subies pendant la pandémie. Même si la COVID-19 semble s'éloigner pour certains, elle continue d'avoir des effets néfastes sur les réponses sanitaires, tandis que les conflits et les maladies infectieuses liées au climat, comme le paludisme, menacent davantage de personnes et font accroitre les risques d'épidémies.
En l'absence d'une accélération ambitieuse des efforts, le monde n’atteindra pas les cibles des ODD liées à la santé et sera encore moins bien préparé à faire face aux futures pandémies.
La réalisation de la promesse des Objectifs de développement durable, notamment de la santé pour tous, passe par la mise en place de systèmes de santé qui ne laissent personne de côté et qui atteignent d'abord ceux qui sont le plus dans le besoin.
Lorsque les programmes et politiques de santé sont guidés par la science, l'équité et l'accès pour tous, nous pouvons mettre fin aux pandémies, celles d’aujourd'hui et de demain.
Notre expérience de la lutte contre le VIH et la tuberculose dans le cadre du partenariat entre le PNUD et le Fonds mondial est riche d'enseignements. En Angola, à Cuba et au Soudan, les programmes de santé visent à améliorer l'accès équitable aux innovations et aux soins, tout en bâtissant des systèmes de santé résilients et durables qui contribuent à atténuer les risques et à faire face aux pandémies, à la crise climatique et à d'autres problèmes de développement.
Innovations en matière de dépistage du VIH
Les progrès réalisés dans la lutte contre le VIH restent inégaux à travers le monde. À Cuba, si les nouvelles infections ont reculé de 13 % depuis 2010, elles ont augmenté de près de 6 % chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes et de presque 20 % chez les transgenres en 2017. Et près d'un tiers des personnes vivant avec le VIH à travers le pays ne reçoivent pas le traitement qui permet de sauver des vies et d’éviter de nouvelles infections.
L’accès au traitement dépend avant tout de la connaissance de son état sérologique vis-à-vis du VIH. Selon les estimations, en 2022, un quart des personnes vivant avec le VIH à Cuba ignoraient leur statut. Pour combler cette lacune, il faut faciliter l'accès au dépistage, y compris pour les transgenres et les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes, qui peuvent être dissuadés de recourir aux services en raison de la stigmatisation et de la discrimination liées au VIH.
En octobre 2022, le PNUD et le ministère cubain de la Santé publique ont introduit l'auto-dépistage du VIH dans 30 dispensaires situés à La Havane et dans les principales villes de province, pour les personnes transgenres et les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. L'auto-dépistage du VIH est rapide et confidentiel, ce qui permet aux personnes qui auraient retardé le dépistage par crainte de stigmatisation ou de discrimination d'accéder plus tôt à d'autres services relatifs au VIH.
Outre les dispensaires, le PNUD aide les ONG MSM-Cuba Network et TransCuba Network à fournir des services de conseils et de santé sexuelle, y compris des tests de dépistage rapide du VIH. Celles-ci mènent des actions de sensibilisation dans les espaces sociaux, tels que les fêtes et les centres communautaires, dans le but d'encourager le dépistage, la prévention et le traitement du VIH. Depuis le début de la pandémie de COVID-19, MSM-Cuba Network propose des tests rapides au domicile de ses dirigeants afin d’en protéger la confidentialité et d’élargir l'accès au dépistage.
En 2022, plus de 43000 hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes et 1010 femmes transgenres, soit respectivement 15 % et 28 % de leur population estimée, ont bénéficié d’un dépistage du VIH grâce à ces deux organisations. L'augmentation des tests de dépistage permet à un plus grand nombre de personnes d'accéder aux services de traitement et de prévention, lesquels ont atteint 88 % des hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes vivant avec le VIH et 92 % des personnes transgenres vivant avec le VIH en 2022.
MSM-Cuba Network expérimente actuellement l'auto-dépistage du VIH dans l'unité de santé Prosalud de La Havane afin de promouvoir davantage les approches communautaires. Le caractère confidentiel et pratique de l'auto-dépistage pourrait permettre d'atteindre davantage de partenaires de personnes vivant avec le VIH et d'autres contacts qui ne fréquentent pas les dispensaires.
Conformément aux recommandations de l'OMS, l'auto-dépistage sera proposé dans tout le pays par l'intermédiaire des dispensaires et des organisations dirigées par des populations clés en 2024. Cette approche permet aux communautés touchées et aux réseaux communautaires de prévenir la propagation du VIH. Elle élargit la couverture des services de santé afin d’atteindre l'objectif de Cuba, à savoir que 95 % des personnes vivant avec le VIH connaissent leur statut, dans le cadre du partenariat entre les Nations Unies, le gouvernement du Cuba et les organisations de populations clés pour, en place depuis 1998 et visant à éliminer le VIH/SIDA.
Agir sur l'équité pour éliminer la tuberculose
Les progrès accomplis à l’échelle mondiale dans la lutte contre la tuberculose, une maladie transmise par voie aérienne plus mortelle que le Sida, ont été anéantis par la pandémie de COVID-19, notamment les perturbations des services de santé qui en ont résulté et son impact sur les moyens d’existence. En Angola, la tuberculose reste la troisième cause de décès chez les personnes âgées de 15 à 49 ans, ce qui place le pays parmi ceux qui enregistrent le plus grand nombre de cas de tuberculose chaque année.
Le taux de couverture des services de santé est faible, en particulier chez les personnes à faible revenu, et 60 % des services de lutte contre la tuberculose se trouvent à Luanda, la capitale. En 2018, plus de 12 % des ménages angolais ont consacré plus d'un quart de leur budget aux soins de santé, ce qui a fait basculer 1,6 million de personnes dans l'extrême pauvreté.
Travaillant en partenariat avec le gouvernement angolais et l’ONG (danoise) Aide au développement de peuple à peuple, le PNUD appuie les efforts d'éducation à la tuberculose dans les localités reculées de Benguela et Cuanza Sul grâce au déploiement d'agents de santé communautaires, qui luttent contre la stigmatisation et les idées fausses qui peuvent retarder le diagnostic et perturber le traitement. Pour tous les cas de tuberculose, ils rendent visite aux patients, leur distribuent les médicaments et les encouragent à terminer le traitement, contribuant ainsi à prévenir de nouvelles infections et la résistance aux médicaments.
Les agents de santé communautaire relient les communautés isolées aux structures de santé, constituant ainsi un lien vital pour la prévention et la lutte contre la tuberculose. Ils atteignent des personnes qui risqueraient autrement ne pas être diagnostiquées et traitées en raison de leur situation géographique ou de leur incapacité à couvrir les dépenses de santé. Ils ont joué un rôle essentiel dans l'amélioration de la notification des cas de tuberculose après l'apparition de la COVID-19, qui a eu un impact négatif sur le dépistage de la tuberculose.
Au premier semestre 2023, le partenariat a détecté 97 % des cas de tuberculose attendus, soit une augmentation de 9 % par rapport aux six mois précédents. Parmi les personnes qui ont commencé le traitement, fourni gratuitement, 83 % ont été guéries - la preuve irréfutable que davantage de personnes mal desservies ont accès aux soins de santé sans encourir des difficultés financières supplémentaires, une condition essentielle à la réalisation de la couverture sanitaire universelle.
Soins de santé en temps de crise
La crise au Soudan a laissé des dizaines de millions de personnes dans le besoin, dans un pays fortement exposé au changement climatique. Plus de 5 millions de personnes ont fui les violences, dont un million vers les pays voisins. Le système de santé soudanais est soumis à une pression exceptionnelle, plus des deux tiers des hôpitaux, principalement à Khartoum, étant hors service.
L'accès limité aux soins de santé est lourd de conséquences. À l'échelle mondiale, plus de 70 % des cas de maladies infectieuses à tendance épidémique sont recensés dans les zones touchées par des conflits, fragiles et vulnérables. Les interruptions du traitement du VIH ou de la tuberculose augmentent les risques de décès, de résistance aux médicaments et de transmission des maladies.
Le PNUD appuie le personnel de santé, les établissements de soins et l'approvisionnement en fournitures médicales afin d’assurer un accès continu aux soins vitaux au Soudan. En collaboration avec le Fonds national des fournitures médicales et le Programme alimentaire mondial, le PNUD livre des médicaments aux établissements de santé qui sont encore opérationnels. Ces fournitures couvriront les besoins immédiats du Soudan pour assurer la continuité du traitement pour quelque 11000 personnes vivant avec le VIH et maintenir le Programme national de lutte contre la tuberculose sur la bonne voie pour pouvoir traiter les 21 000 cas attendus.
Le PNUD collabore avec le Programme national de lutte contre le VIH et la tuberculose pour cartographier les établissements de santé opérationnels et localiser tous les patients ayant besoin d’un traitement contre le VIH ou la tuberculose. Le PNUD aide à couvrir les charges de personnel, les frais de communication, les dépenses de carburant et autres coûts de fonctionnement dans les établissements de santé de l'État et les programmes communautaires afin d'assurer la continuité des services de prise en charge du VIH et de la tuberculose. En outre, le PNUD déploie neuf centres mobiles de soins de santé primaires dans des zones reculées et difficiles d'accès, notamment pour les personnes déplacées, en partenariat avec le ministère fédéral de la santé, l'OMS et des ONG humanitaires.
Le PNUD appuie par ailleurs la réhabilitation du système de santé. Des fournitures et équipements pour les diagnostics de laboratoire, des installations solaires dans 110 établissements de santé, de l'oxygène fourni par sept unités et bouteilles d'adsorption modulée en pression (PSA) et deux incinérateurs de déchets biomédicaux de grand volume permettent aux services de santé de rester opérationnels.
Cet appui contribuera à éviter que la catastrophe humanitaire ne s'aggrave, tout en renforçant le système de santé afin de prévenir une épidémie de VIH et de tuberculose de plus grande ampleur. Il s’inscrit dans le cadre de l’Offre de stabilisation communautaire d'urgence au Soudan du PNUD, qui soutient également la création d'emplois d'urgence, le maintien de la production agricole et la continuité des services essentiels tels que l'accès à l'énergie propre et les systèmes d'approvisionnement en eau à l’énergie solaire. Ensemble, ces programmes contribuent à préserver les progrès socio-économiques et à remédier aux déficits de développement sous-jacents qui sont à l'origine des conflits, lesquels peuvent aggraver le risque de pandémie.
Tenir notre promesse
En Angola, à Cuba, au Soudan et au-delà, le PNUD œuvre pour l’accélération des progrès vers l’atteinte des Objectifs de développement durable afin de réaliser la promesse de la santé pour tous, sur une planète prospère. Dans le domaine de la santé, nous travaillons en partenariat avec les pays et les communautés pour bâtir des systèmes de santé résilients et inclusifs qui permettent d'en finir avec les pandémies existantes, comme la tuberculose, de réaliser la couverture sanitaire universelle ou encore de se préparer aux pandémies futures, qu'elles soient liées au changement climatique ou aux conflits.
Pour les dirigeants du monde réunis à New York, la complaisance, le statu quo et le bricolage ne sauront suffire. Nous devons avoir l'ambition nécessaire pour mobiliser l’action et les investissements dans des systèmes sanitaires à même d’assurer des services de santé à tous, partout, aujourd'hui et demain.
Nous devons tenir notre promesse.
Garantir à tous une vie en bonne santé et le bien-être, sur une planète florissante.